Connaissez-vous la bande dessinée « le chat du rabbin ». Le chat du Rabbin parle et il intervient dans l’histoire des hommes. Un jeune rabbin et une belle jeune femme s’aiment. Une belle histoire qui démarre. Un problème de taille se dresse toutefois entre eux : il est juif et elle est catholique. Qu’à cela ne tienne, prête à tout pour faire plaisir à son futur mari et pour mieux s’intégrer dans sa nouvelle vie, elle décide de se convertir au judaïsme. Mais c’était sans compter sur le vieux rabbin qui fait tout pour l’en dissuader, allant jusqu’à la menacer de la faire psychanalyser si elle persiste dans son envie. Car le rabbin en est convaincu, nul ne pourrait vouloir se convertir au judaïsme pour une bonne raison.

Franchement, à part être né dedans, rien ne peut justifier qu’on puisse vouloir suivre les 613 commandements pour être un bon juif. Et voilà qu’en plus, cette belle blonde se met à demander pourquoi ? Pourquoi ces commandements ? Pourquoi devrait-on laver les steaks avant de les faire cuire ? Mais le chat est là pour lui expliquer. Ne jamais se poser la question du pourquoi, car tout cela évite de penser à la mort.

Dans un dialogue mémorable entre cette jeune femme blonde qui s’initie à la cacherout et celle qui l’enseigne, l’épouse d’un autre jeune rabbin, la question lui est posé au bout d’une longe pratique : « n’est-ce pas trop compliqué ?» Réponse de la jeune femme au bout de ce long apprentissage : « j’applique bêtement des règles et manipule des casseroles que je dois laver sans cesse, utiliser tel contenant pour tel aliment, ne pas les mélanger, c’est tellement incompréhensible que j’applique bêtement les règles et ça me vide l’esprit qui peut enfin se reposer ». Bien sûr, il y a 7 règles fondamentales que les rabbins expliquent théologiquement mais la mise en œuvre de ces 7 règles devant le fourneau est un casse-tête insupportable. Est-ce cependant la méthode pour reposer son esprit ?

D’autres enjeux s’imposent lors du premier concile de Jérusalem. Les apôtres sont sollicités pour prendre une décision qui permettra de dépasser une grande crise. Les chrétiens d’origine juive sont circoncis et considèrent comme des païens ceux qui ne le sont pas ; mais plus grave encore, tout les oppose dans la vie quotidienne, à cause de toutes les pratiques juives auxquelles les chrétiens d’origine païenne n’ont aucune envie de s’astreindre : de nombreuses règles de purification, d’ablutions et surtout des règles très strictes concernant la nourriture. Et voilà qu’un jour des Chrétiens d’origine juive sont venus tout exprès de Jérusalem pour envenimer la querelle en expliquant qu’on ne doit admettre au baptême chrétien que des Juifs ; concrètement, les païens sont priés de se faire Juifs d’abord, (circoncision comprise) avant de devenir Chrétiens. La décision de la réunion au sommet à Jérusalem a permis de rétablir la communion. Les apôtres n’imposent à la communauté chrétienne que les règles qui permettent de maintenir la communion fraternelle.

Il n’est plus question d’imposer la circoncision aux chrétiens issus des nations. Comme le suggère l’Apocalypse, Jérusalem devient une cité ouverte, où peuvent venir non seulement les douze tribus, mais la foule immense des appelés. Cette cité n’a pas besoin de Temple, puisque son Temple, c’est le Seigneur et que la gloire de Dieu l’illumine. Tout est en référence au Christ ressuscité. L’Esprit-Saint le redira aux disciples de Jésus.  “Dans la résurrection du Christ, tu nous recrées pour la vie éternelle.” Jésus dans le texte de l’évangile de ce dimanche, annonce le don de l’Esprit Saint : « Le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. » Le Père nous a fait don de son Fils. Il envoie maintenant son Esprit Saint.

Nous sommes aujourd’hui les bénéficiaires de ce don de Dieu qui est sans repentance. «Si quelqu’un m’aime… ».  Sans repentance mais pas sans nous ! Si nous le voulons ! C’est à nous de faire croître en nous sa présence. A chaque acte de foi, à chaque geste d’amour, à chaque temps donné à Dieu correspond un accroissement en nous de la présence de la Sainte Trinité. L’Esprit Saint est à demeure pour tous baptisés mais nous pouvons le laisser s’éteindre sous une couche de médiocrité. L’Esprit-Saint est pourtant à demeure, il demeure dans le cœur, enfoui peut-être, mais bien présent. Les incroyants, les croyants des autres religions sont aussi visités dans l’ouverture de leurs cœurs, à certains moments. Nous, baptisés et confirmés, avons-nous conscience de la chance que nous avons d’être temple de l’Esprit Saint qui réside en nous à demeure ? Avons-nous conscience aussi de la responsabilité d’accueillir et de rayonner la paix que Christ nous livre. « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. »

Dans le contexte de l’évangile de ce jour, il semblerait que seul le Christ est en paix. Pourtant l’heure est grave. Jésus prépare ses disciples à son départ, à savoir sa mort et sa résurrection. Shalom en Hébreux sert à dire bonjour mais il peut avoir un sens plus profond, le sens de plénitude et même de réparation. Shalom peut réparer, restaurer une solidité qui a été mis à mal. Quelle réparation Jésus prépare juste avant sa Passion et sa Résurrection ? La confiance brisée par la tragédie de la Croix ! « Et nous qui espérions … » Les conséquences de la croix c’est la peur, consciente ou pas. La peur empêche la joie. La peur provoque la tristesse. D’où l’expression de Jésus, ne soyez pas effrayés. Comment Christ répare ? Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie. L’antidote de la peur, c’est l’amour ! Quel amour ? L’Amour de Dieu qui purifie notre manière d’aimer. L’amour purifié par l’Amour divin construit l’autre, le guérit, l’aime malgré tout, concourt à son éclosion spirituelle, révèle son génie particulier, favorise sa croissance, lui permet d’accepter son passé et ses limites, le délivre de ses démons. C’est ce que le Christ ne cesse de faire dans ses rencontres. Il nous met sur le chemin de la vraie liberté. 

Bmg