L’homme se sait mortel puisqu’il habite un monde marqué par la finitude et la mort. Grandeur de l’homme déchiré par la question : pourquoi mourir avec au fond du cœur ce désir inaliénable d’immortalité ? On peut faire semblant d’ignorer la mort. C’est le « même pas mal » de certains enfants à propos de la douleur. C’est cela le déni. Sur cette question, la pandémie actuelle est un électro-choc. Qu’offre comme alternative le christianisme ?

Le christianisme c’est Pâques aurions-nous tendance à simplifier ! Si Pâques n’existait pas, le christianisme n’existerait pas. Ce que célèbre Pâques, c’est la Résurrection du Christ. La question de la Résurrection oblige à un long cheminement intérieur. C’est toute l’histoire de Jean  qui dans la proximité avec le Christ va faire un passage : de l’ancien au nouveau monde. Il raconte ce qui s’est passé le matin de Pâques.

Ce sont encore les ténèbres mais c’est de grand matin. La lumière rasante de l’aurore commence à dissiper l’obscurité : ouverture donc, passage de la mort à la vie triomphante. La pierre roulée en est le symbole, le tombeau est rendu accessible à une nouvelle réalité. Marie-Madeleine, encore toute embrumée et envahie par la tristesse cherche de l’aide auprès des apôtres non pour chercher le vivant mais toujours le corps inerte du crucifié. « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé. » Marie-Madeleine n’est toujours pas sortie de l’ancien monde ; elle n’a pas encore pris conscience de la nouveauté advenue.

Pierre et Jean accourent.

Pierre, sans hésiter, entre dans le tombeau. La lumière de la résurrection n’a pas encore fait naître en lui un nouveau regard capable de saisir dans les événements le monde nouveau qui surgit. Dans la pénombre du tombeau, il ne voit que linge et linceul.

Il ne peut que prendre acte de l’absence troublante du corps du Seigneur.

Jean n’entre pas tout de suite ; il « se penche » et « contemple le linceul resté là ». Son regard scrute l’invisible et « voit ». Bien sûr, il voit ce que Pierre a vu mais bien plus. « Jean vit et il crut » nous dit l’évangéliste. Jean était au pied de la croix. Il a vu mourir Jésus. L’Evangile de la Passion selon St Jean précise que Jésus remit l’Esprit. L’évangéliste ne dit pas que Jésus rendit l’Esprit mais qu’Il remit l’Esprit. Pour lui, Jésus meurt sur la croix en livrant déjà l’Esprit. Difficile pour nous de comprendre que la mort de Jésus donne la vie, donne l’Esprit. L’Esprit change notre regard, change le regard de Jean. Que voit-il ? Des linges mais disposés d’une certaine façon. Il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part, à sa place ». Le suaire autour de la tête de Jésus, c’est le linge roulé qui enserre la tête et qui retient la mâchoire. Il est roulé à sa place, c’est à dire en place. Le drap proprement dit qui a enveloppé le corps de Jésus posé à plat. C’est dire que le corps de Jésus n’est plus là et cependant, rien n’a été déplacé. Jean a compris cela et en plus, il fait un lien avec l’Ecriture.

Le disciple bien aimé est capable de saisir au plus profond du tombeau, au creux tragique des événements ce qu’avait annoncé les écritures. « Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts ». Quelle phrase de l’Ecriture arrive alors à l’esprit de Jean lui permettant de faire ce passage dans la foi en la résurrection ? Aucune phrases précises dabs le premier Testament, juste un faisceau d’indications invitant à entrer dans le monde nouveau de la Résurrection. Quant aux paroles de Jésus, comment Jean peut-il oublier cette phrase e Jésus ?: « Détruisez ce temple et en trois jours je le rebâtirai ». Seul l’esprit illuminé par la foi, l’espérance et l’amour peut discerner, le mystère du Jour nouveau et du Monde nouveau, le mystère de la nouvelle création qui s’annonce, le mystère de la présence du Vivant qui vient combler notre attente. « Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité ».  De la croix a jailli l’eau vive du salut et c’est notre joie. Maintenant, nos yeux éblouis par la lumière de Pâques saisissent cette joie comme un cadeau inespéré : Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité. Christ est ressuscité et c’est pour nous qu’Il est ressuscité. Les effets de la résurrection agissent déjà dans notre vie. Au milieu de notre chaos, Dieu trace des chemins de libération. La résurrection est cette nouveauté, cette nouvelle création dans nos vies. Oui ! croyons aussi à l’expérience de la puissance de la résurrection dans la nuit de ce monde. Mettons-nous à l’écoute de ce monde en souffrance, de ce monde en attente. En son nom, accueillons ce mouvement puissant qui nous fait passer de la mort à la vie.