Dieu est du côté des innocents, Dieu est du côté de Suzanne. Sauve-il tous les innocents comme il a sauvé Suzanne ? Sauvent-ils les innocents tués en Ukraine par l’armée Russe ?

Comme c’est difficile de comprendre comment Dieu sauve ! Christ est la clef pour comprendre comment Dieu sauve. Encore faut-il l’accueillir !

Les Pharisiens et les scribes sont des gens honnêtes, qui, à chaque instant et dans les moindres détails de leur vie quotidienne, essaient de faire ce qui plaît à Dieu. Il faut savoir que les Pharisiens étaient réellement des gens très bien, très pieux et fidèles à la Loi de Moïse. Alors pourquoi ne comprennent-ils pas qui est Jésus ? Le texte de Saint Jean nous raconte qu’il y a en eux un obstacle qui les coupe à la fois du Christ qu’ils sont incapables de reconnaître et de Dieu le Père.  « Vous ne connaissez ni moi ni mon Père ; si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. »Pourquoi n’accueillent-ils pas et en particulier cet enseignement de Jésus : « « Moi, je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, il aura la lumière de la vie. » De quelle lumière s‘agit-il ? C’est la lumière au Mont Thabor qui a rayonné de Jésus transfiguré, la lumière qui rayonne de Jésus transfiguré révèlant sa divinité. Quelle est la nature de cette lumière ?  C’est le symbole de ce qu’Il partage avec le Père. La Transfiguration nous révèle l’Amour entre Jésus et son Père. Cette lumière qui resplendit de Jésus est sacrement de l’Amour qui les unis. Elle est elle-même indescriptible car elle éveille à une réalité d’une intensité inouïe. Cette qualité d’Amour est offerte à tous les hommes par l’Incarnation du Verbe qui vient déposer à l’intérieur de chaque vie humaine la semence d’une telle relation. C’est ce que refusent les pharisiens. En fait ce qu’ils ne peuvent concevoir, c’est l’abaissement du Verbe dans son Incarnation.  La lumière dont parle Jésus est enfouie dans l’humanité du Christ qui s’est fait chair.« Le Christ Jésus de condition divine ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu…il s’est abaissé. » Pourquoi s’est-il abaissé ? Pour nous rejoindre dans la réalité de ce que nous sommes, des êtres faits pour la lumière et confrontés à nos ténèbres…

C’est tout le sens du combat de Jésus à Gethsémani. Gethsémani, c’est Dieu livrée au creux de l’angoisse et de la souffrance. C’est le lieu de la souffrance du Christ visité par Dieu lui-même. L’Amour du Christ est puissant, guérissant, libérateur, et cela jusqu’au plus profond abîme de la détresse que Simone Weil appelle le malheur. Simone Weil est une philosophe juive, tourmentée qui, au cœur de la tragédie de la deuxième guerre mondiale, va tenter de rendre compte de la libération du malheur par le Christ. C’est essentiellement dans les évangiles qu’elle cherchera la réponse. « Le malheur n’est pas un état d’âme. C’est une pulvérisation de l’âme par la brutalité mécanique des circonstances. La transmutation de l’homme à ses propres yeux, de l’état humain à l’état d’un ver à demi-écrasé qui s’agite sur le sol, n’est pas une opération où même un perverti puisse se complaire. Un sage, un héros, un saint non plus ne s’y complaisent pas. Le malheur est ce qui s’impose à un homme, bien malgré lui. Il a pour essence et pour définition cette horreur, cette révolte de tout l’être chez celui dont il s’empare » Simone Weil s’interroge : « Il est étonnant que Dieu ait donné au malheur la puissance de saisir l’âme elle-même des innocents et de s’en emparer en maître souverain… » C’est ce qui est raconté par les quatre évangélistes à Gethsémani, à savoir le combat du Christ contre une angoisse démesurée et une détresse immense. Voilà comment le résume Simone Weil : « Le malheur a contraint le Christ à supplier d’être épargné, à chercher des consolations auprès des hommes, à se croire abandonné de son Père ». Jésus crie, angoissé « Que cette coupe s’éloigne de moi » !

Le Christ accepte pleinement par amour de vivre l’absurdité de la souffrance pour lui donner un sens. Comment peut-on donner un sens à la souffrance ? Seul Le divin peut le faire. Quand le divin touche la blessure humaine, les mots peuvent être posés comme une mise à distance. « Que cette coupe s’éloigne de moi ». Ces mots jaillissent de la souffrance innocente et disent l’absurdité de la défiguration qu’elle provoque. 

« Père non pas ma volonté mais ta volonté !  » Dans un deuxième temps, après avoir vécu l’angoisse, la volonté humaine du Christ dans un arrachement douloureux s’ajuste à sa volonté divine. Se résout alors dans ce feu de l’amour divin, le paradoxe du scandale du mal et de l’éternel Innocence de Dieu. Dieu, sans complicité avec le mal, assume l’absurdité de la souffrance au cœur même de la pâte humaine et lui donne son sens, l’Amour. Les fruits de ce don de soi jusqu’au paroxysme de l’Amour, c’est la résurrection. Pour nous donner de partager sa vie filiale, Jésus va assumer toutes les ténèbres de notre humanité ; péchés, blessures, souffrances … Dans la lumière dans laquelle il vit dans la communion avec son Père, il sait combien nous avons bien du mal à accueillir cette énergie d’amour qui ne demande qu’à nous traverser et nous emnener au-delà de nous-même. Cette lumière, le Christ va aller la déposer au cœur des ténèbres par sa Passion et sa Croix. Nous sommes invités à déposer sans cesse nos péchés, nos ténèbres, nos blessures dans le Christ. En échange, nous recevons une capacité nouvelle d’accueillir la lumière de la communion avec le Père dans l’Esprit saint. Ce que vit Jésus avec son Père et qui nous est révélé dans la lumière du Thabor, nous le recevons en quelque sorte au Calvaire ; lorsque nous remettons dans le cœur transpercé de Jésus toutes nos ténèbres, les nôtres et celles des autres, nous sommes enfants de lumière même si cela ne semble pas évident pour nous. Nous recevons dans notre cœur profond la communion avec le Père, cette communion manifestée en notre faveur dans la Résurrection de Jésus.

Bmg